En 2010, nous sommes déjà en train de travailler sur un voilier en contreplaqué plastifié très ancien : une pièce unique construite au chantier du Grau du Roi ! Ses lignes sont superbes. C’est un plan Maurice Amiet de 1965 construit à l’unité et inspiré du Faraman. Une innovation à l’époque avec son maître-bau de 3 m pour 9,65 de long. Par hasard, je tombe sur l’annonce d’un vieux Chatam 33 en acier à vendre pour une bouchée de pain et j’en parle à Edward aux mains d’argent (pas d’or tout de même… il ne faut pas charrier hein !). « Chatam » et « plan Caroff » sont des mots synonymes de voyage…
Pour faire des bêtises, il faut être deux et sommes toujours d’accord pour ça. L’un de nous a le feu vert pour aller voir l’affaire du Siècle. Ce n’est pas le coup de foudre car il y a beaucoup trop de travail en perspective. Histoire de sauver le bateau et parce que nous sommes masochistes, proposition est faite d’un achat au prix de la ferraille ! Elle est acceptée avec soulagement par le vendeur. « Mince, on s’est fait avoir ! »
Nous voilà engagés pour le pire et le meilleur comme dans un mariage sauf que là, on commence par le pire…
Un mois plus tard :
Il n’y a que cinq ou six milles à faire pour atteindre l’endroit où une grue sera capable de le soulever afin de le mettre sur un camion qui le déposera chez nous. Sans moteur et sans vent, ce n’est pas évident d’autant qu’il sera impossible de slalomer là où il faut l’amener : un semblant de quai minuscule au fin fond de Balaruc avec une multitude de rafiots faisant barrage de chaque côté. Il nous faut une solution…
Puisqu’il y a une chaise pour hors-bord, il suffit d’en louer un pour la journée.
Avec 7 CV et un peu d’enthousiasme, c’est « fingers in the noze ! »
Décidément, le bateau (ou ce qu’il en reste) veut être sauvé car il fait tout comme il faut pour partir vite loin d’ici. D’abord, malgré ses voiles fichues, il profite de la moindre brise pour avancer. Ensuite, malgré le hors-bord poussif pour 6 T de ferraille et mon stress à la barre qui en découle, il se débrouille pour poser gentiment sa quille là où Bob mon bricoleur, l’a décidé très exactement. Oui en plus, il n’y a pas assez de fond pour son tirant d’eau mais il est nécessaire de le rapprocher au maximum. Une fois en l’air, tout le monde s’attroupe enfin pour admirer la cargaison de moules accrochées au bateau. Allez hop fini le spectacle… direction la cambrousse !
Oui, le bateau voulait vraiment être sauvé et les moules l’ont aidé comme seules de vraies copines peuvent le faire ! À l’arrivée, une fois tous les coquillages grattés, on se rend compte qu’un petit trou dans la coque avait été bouché par l’un d’entre-eux.
Un grand merci aux mollusques !
On ne le sait pas encore mais cinq longues années seront nécessaires pour transformer cette épave en bateau tout neuf.
Pas de vacances et double travail : celui en journée pour « gagner sa vie « , celui du soir pour la vivre un jour !
Merci à nos enfants qui ont supporté notre folie douce.
Merci à nos amis qui nous ont soutenus et aidés de diverses manières.